vendredi 30 avril 2010

la pensée du jour

L'opinion commune n'aime guère qu'on lui oppose l'expérience d'un retournement sur soi; en revanche, que des affiliés à vie persistent dans la fidélité à leur propre bêtise, cela ne semble gêner personne. (J.P. Martin in "Eloge de l'apostat"Fiction & cie Le Seuil 2010.

vendredi 23 avril 2010

Novelette 1

Départ


On n’a jamais rien su de ce qui s’est passé ce jour-là. C’est resté dans la mémoire des morts, chacun ayant gardé pour lui ce qui aurait pu se dire, afin de ne pas détruire ce qui pouvait rester d’harmonie entre eux. Impossibles à dire, les mots fussent de toute façon restés bien faibles, bien insuffisants.
La seule chose dont on puisse être sûr, c’est qu’à un certain moment, esquissant le geste de quitter sa chaise, il a dit : “ Bon, maintenant, il faut que j’y aille !” sans se lever encore toutefois, tous trois se regardant.
Encore là, mais déjà parti, sans envie véritable, mais nécessité pourtant que personne n’évoquerait - et surtout pas lui - sans aucune précision, laissant chacun imaginer à sa façon, la moins douloureuse possible, chercher une explication, un fait, une date plus ou moins lointaine que lui-même aurait oubliée si elle avait existé, qui aurait été à l’origine de tout, affronté qu’il était aujourd’hui à cette décision qui s’imposait à tous, mais qu’il ne reconnaissait déjà presque plus comme sienne. Lentement mûrie - d’autant plus solide, inexorable - pendant des années dans le silence puisque n’en pouvant parler à personne, même pas - surtout pas - à ce père dont il était pourtant si proche et maintenant que tout aurait pu se dire, chacun choisissait de se taire, la pensée n’ayant pas pris la même direction pour chacun d’eux et appelée d’ailleurs à changer dès qu’il aurait franchi la porte, à changer encore demain et à changer tous les jours qui s’ensuivraient jusqu’à ce qu’on ne reconnaisse plus rien, la douleur se faisant à la fois plus présente et moins forte et qu’il ne reste de cet instant si intense et à bien des égards si émouvant, que l’idée que l’on pourrait se faire d’une image disparue, à moins qu’ayant tout oublié de ce qui s’était exprimé au cours de ce long silence, l’un ou l’autre ne gardât en mémoire qu’une attitude, un regard vers la pendule, un geste vers le chien qui dormait à leurs pieds devant la cheminée, celui-ci ne s’attendant à rien - pas comme eux - profitant seulement de la chaleur du feu, un peu de fumée s’échappant toujours dans la pièce pour aller noircir un peu plus les grandes figurines des deux joueurs de cartes qui s’affrontaient au-dessus de la cheminée depuis de longues années, le visage de l’un, grimaçant et hurlant : “capot !”, mais sur lesquelles on ne voyait plus que les chiures de mouches vraiment trop nombreuses, bref, chacun n’ayant rien gardé de soi ou presque, seulement quelque chose venu d’un des deux autres et pas nécessairement de celui qui s’apprêtait à les quitter. C’est ça qu’il avait voulu dire tout à l’heure, que c’était l’heure, qu’il n’y pouvait plus rien, n’ayant rien décidé lui-même, que c’était une fatalité, que le temps était venu mais aussi que le temps était passé, qu’un autre temps allait commencer sitôt qu’il aurait quitté la pièce, qu’il allait se séparer d’eux - et pas seulement de l’un ou de l’autre - malgré lui, sans qu’on sache au juste où il allait, ni où il serait demain, juste que ce serait au-delà de la mer, en pays étranger, loin d’ici. Peut-être avait-il ajouté, au tout dernier moment : « Vous direz à mon frère »…, mais sans terminer sa phrase, la mère ayant aussitôt tranché : » Oui, on lui dira, ne t’inquiète pas », en ce moment où le fait d’être ensemble n’avait déjà plus aucun sens, gestes inaboutis et parole muette, lui ne le prolongeant et eux ne l’acceptant que comme une formalité parfaitement vide, mais peut-être nécessaire, pour plus tard, quand il ne serait plus là. Et que valait la promesse de revenir un jour quand l’avenir se faisait aussi impénétrable, aussi indéfinissable que ce présent auquel tous les trois se heurtaient en silence, lui regardant tour à tour son père et puis sa mère, celle-ci longuement, avec un regard qui ne disait ni une indulgence qui n’eût pas été dans l’ordre des choses ni une indécente compréhension ?

jeudi 22 avril 2010

avec ou sans S ?

À la T.V.,
200 euros se prononce "deux cent Heuros",
mais
100 euros, se prononce "sans euros". (on fait la liaison !)
Porquoa ? comme disait Grocq, jadis ?

mea culpa

Je présente mes excuses à ceux de mes lecteurs qui m'ont fait remarquer que pour bien critiquer, il vaut mieux être exempt soi-même de trop de relâchements, d'à peu-près et de fautes de français et de frappe). Soit. Je promets de faire plus attention, tout en essayant de garder un peu de la vivacité et de la spontanéité de mon "ressenti". (Moi aussi, je sais jargonner !)

Science sans conscience

Cette sentence a été bien oubliée, telle est la leçon que l'on peut tirer de l'article publié par Marc Dufumier dans "Télérama"n°3144 du 17 au 23 avril, déjà commenté ici. Précisons que l'auteur n' a rien d'un quelconque "baba" : il est le successeur de René Dumont à la chaire "Agronomie comparée et développement" de l'I.N.A. Paris-Grignon, formateur de nos futures élites agronomiques.
Dufumier a beau jeu de rappeler les dégâts de l'agriculture intensive : pollutions généralisées, gaspillage et dégradation des ressources en eau, moindre qualité des produits, appauvrissement des sols (absence de restitution de la matière organique, abus de pesticides et d'engrais, labours trop profonds,etc), tout ceci pour aboutir à la désertification des campagnes et à la ruine d'innombrables exploitations agricoles ( plus de1,5million ont disparu en 40 ans). Tout ceci pour le bénéfice exclusif de quelques grands céréaliers et sucriers du Bassin Parisien, gavés des subventions de Bruxelles, de ce qu'on appelle l'agro-industrie et la grande distribution.
Un exemple ? Citons Dufumier : " Quand on veut faire épiler des canards par des robots, il faut que les canards naissent tous identiques,donc clonés, il leur faut la même alimentation, qu'ils soient apportés le même jour à l'abattoir qui ne peut les traiter que d'une seule et même façon".
Nous avons été les témoins, durant ces "Trente Glorieuses" (pas si glorieuses que ça, finalement) de l'application avec laquelle les chercheurs se sont efforcés, chacun dans son secteur et sans aucun état d'âme, d'atteindre des objectifs soigneusement cachés par ceux qui se proposaient d'en profiter.
Grâce aux travaux des zootechniciens, par exemple, on a élevé la production moyenne d'une vache (qui allait de 1000 à 3 ou 4000 kg de lait par an avant guerre à plus de 10 000kg aujourd'hui. En contrepartie, ce lait est pauvre, sans goût, traité (et maltraité de mille façons) et l'éleveur, qui, avec 100 ou 150 vaches, gagne moins que le S.M.I.C. a endetté sa famille pour des générations. Mais Nestlé se porte bien.
Autre incidente : quand le bon sens paysan (la Pratique, Monsieur !) avait, au fil des siècles, réussi à "fabriquer" la race la mieux adaptée au climat et aux aux ressources locales - c'est-à- dire, en fait, la plus "productive" pour lui, on en est arrivé à imposer partout le même "modèle d'animal" auquel on demande la plus forte croissance (production de viande), au détriment de sa rusticité (aptitude à supporter des conditions de pénurie), le même modèle d'habitat, bref, à produire plus cher partout. Dans les années 60, on appelait ça "le Progrès Technique".
Dans le même temps, les brebis du nord de l'Ecosse, n'ont jamais vu une bergerie), ce qui permet à l'agneau britannique d'être moins cher que le nôtre. Et ne parlons pas de l'agneau néo-zélandais (qui ne mange que de l'herbe et passe sa vie en plein air... mais qu'il faut,il est vrai congeler et transporter à grands frais d'énergie depuis les antipodes).

Tout cela, parce que pendant trop longtemps, la Recherche a refusé qu'on essaye d'aborder les problèmes d'un point de vue plus global, tant soit peu synthétique et qu'on se préoccupe de ce que les militaires appellent maintenant sans vergogne "les dégâts collatéraux". Dans ces conditions, rendons hommage à la lucidité (et au courage) de ce chercheur-professeur que le "modèle unique" préoccupe au plus haut point et qui ne voit d'autre avenir pour ceux qu'on n'ose plus appeler "paysans" (ils ont tellement revendiqué d'être, eux aussi, des "producteurs" !)que dans une élévation de la qualité de leurs produits et dans la diversité des productions. À supposer que ce soit maintenant l'aspiration d'un ombre croissant de consommateurs, sinon celle de Mac Do.
Discours de chevelu, d'écolo ? Propos politique ? Assurément.

mardi 20 avril 2010

perles n°3,4,et autres

Je salue l'entrée - pas très discrète , mais bien installée-dans le vocabulaire officiel courant, des adjectifs qualificatifs "récurrent, drastique" et des verbes "démarrer, "débuter" et "perdurer" (ah! celui-ci, il est beau !) en me demandant comment on avait pu se passer jusqu'alors de ces mots.
Je salue aussi l'innovation phonétique du verbe "sculpeter" proposée hier à la T.V par Mme Béatrice Shoemberg (émission "les toqués du chocolat"; À tout hasard, je lui rappelle l'indication phonétique du Petit Robert, qui recommande de prononcer :"skylte", sans oser espérer cependant qu'elle laisse tomber ce "pt" plutôt inconvenant.

mysoginie orthographique

Oh ! Monsieur le Premier ministre ! Pas vous !
Hier, au "Grand journal "de Canal+ vers 20H15 Monsieur E.Balladur a déclaré avec l'air sérieux (et même un peu plus que ça) qui suffit à le distinguer parmi les grenouilles du marais politique, ,que "quand à la réponse que je vous ai FAIT " ...élidant délibérément le "e" que j'attendais.
Une fois de plus, vous m'avez déçu.

lundi 19 avril 2010

La paix

Jean Daniel, fondateur du Nouvel Obs., homme et journaliste estimable explique à la T.V. (émission "Empreintes") que si tous les peuples veulent la paix, en réalité, c'est la sienne propre que chacun veut.Ce qui explique toutes les guerres.( Sans doute est-ce valable pour les humains entre aux au stade individuel).en est-il de même pour chacun de nous.
C'était dit avec un tel sérieux et une telle conviction que je suis promis de faire mon profit de cette sentence... jusqu'au moment où il m'a semblé que cette porte qu'on enfonçait était déjà plus que largement ouverte.
Retour au statu quo ante : problème sans solution.

jeudi 15 avril 2010

chats et chattes

Mon chat est un animal insignifiant et sans intérêt qui passe son temps à dormir, puisqu'il n'a plus le droit de rêver aux filles. (À moins que..;)Il m'aime à sa façon et je fais de même. Passons.
Je préfère parler de tous ses semblables qui ont eu la chance de conserver leurs "dignités" et qui parcourent des kilomètres, bravant tous les dangers (voitures, chiens, humains agressifs) pour assurer leur devoir de reproduction. Nous, les mâles humains, ne sommes-nous pas capables, comme eux, de nous exposer à tous les risques, à toutes les humiliations pour répondre à l'appel du désir et du sexe ? (philosophie à 3,75)
Plus intéressant me paraît l'exemple des chattes, leurs femelles, en matière d'éducation.
Combien de familles se porteraient mieux si la mère avait su, l'allaitement terminé (je veux dire vers la fin de l'adolescence), repousser leur chaton garçon ou fille à coups de griffe, pour enfin le rendre autonome. Un peu dur au début, mais tellement bénéfique pour la suite ! (même constat que plus haut).

mercredi 14 avril 2010

Je recommande

... la lecture dans le dernier numéro de "Télérama" d'un article intitulé "le monde paysan est-il condamné ?"
Son auteur est un agronome qui s'appelle Dufumier et qui - le croiriez-vous ?- entre mille remarques intelligentes, déplore que le fumier (et le jus qui va avec, qu'on appelle le lisier" soit répandu en excès en Bretagne, quand, dans toutes les régions céréalières, on a cessé d'en utiliser !
(Dans les deux cas, alerte pour l'avenir de la terre.)
Je me contente d'ajouter que Marc,Dufumier est chercheur à l'INRA, qu'il n'est pas sans courage de s'exprimer aussi librement. Il est vrai qu'il est aussi un des acteurs du fameux "Grenelle de l'Environnement. ", déjà bien oublié.
Pour ceux qui ne connaissent pas mon passé de paysan puis d'agronome et qui ne sauraient pas que je me reconnais quelques droits à traiter de ce sujet, je me propose de commenter plus longuement bientôt ce que nous dit cet homme.

Allègrement

Avant-hier, un froid de canard à Montpellier. Normal, on était en hiver.
Aujourd'hui, une chaleur estivale et menace d'orage.
Ah ! ce réchauffement climatique !

Perle n°2

Le salut de la vesprée ;" Bonsoir !" se dit désormais "Bonne soirée !" Bon, ça change et c'est correct, mais j'aime moins quand on me dit "Arouahh" ! pour "Au revoir".

Perle n° 1

Vous trouverez désormais cette rubrique (qui devrait devenir régulière) que j'entends consacrer aux fautes de langage entendues à la radio ou à la télé. Manque d'imagination ? Assurément ? Originalité ? Non plus. Alors ? Rien. Sinon que ça m'agace et que ça me soulagera peut-être de partager cet agacement avec vous !
À tout seigneur, tout honneur. Voici ce qu'a lâché hier , Mossieu Jean-Pierre Raffarin à la T.V. (de mémoire) : Face à cet inconvénient qui sont les risques, etc." Il voulait sans doute dire QUE sont les risques.

vendredi 9 avril 2010

Décisions

J'ai essayé de gouverner ma vie, comme on dit.
Et me voici obligé de constater que la plupart des décisions que j'avais prises étaient mauvaises. Du moins est-ce ce que je conclus au vu des résultats.
Il y a longtemps que je soupçonne que plus que la décision elle-même, ce sont ses effets qu'il faut gérer. Admettre que tout se paye et que, si cela va mal, c'est qu'on a fait - à un moment ou à un autre - fait ce qu'il fallait pour que ça aille mal.
Autant dire qu'il vaut autant laisser la vie faire elle-même ses choix, rester calme et attendre que la roue tourne puisqu'il est avéré qu'elle ne saurait rester immobile. Roue du Dharma des bouddhistes, lesquels ont, je crois, compris beaucoup plus de choses que notre Occident chrétien, bardé d'une morale cléricale, assoiffée de puissance et finalement dévastatrice.

lundi 5 avril 2010

Silence

Que personne ne m'en veuille d'avoir laissé ce blog au repos pendant une dizaine de jours. Ce silence a résulté d'une explosion de mon disque dur (laquelle a entraîné au passage la perte de toutes mes données non préservées et, entre autres, de mon carnet d'adresses.)
Vous ne pouvez pas savoir à quel point vous m'avez manqué !

Vous me faites suaire

Ce n'est pas que le mystère de ce qu'on appelle "le suaire de Turin" me préoccupe. Loin de là, ça me passerait plutôt comme un courant d'air sous les bras, mais, ne serait-ce que pour montrer mon ouverture d'esprit, j'ai voulu voir à la T.V. le résultat annoncé des nouvelles recherches. Après tout, entre la vie sentimentale de Johnny, celle de notre président et les rugissements de Monsieur Frédéric Lefèvre, s'il faut choisir...
`Je vous assure que j'ai suivi avec beaucoup d'assiduité et d'attention, bien décidé à connaître la vérité qu'enfin on allait nous révéler.
Pour l'essentiel, j'ai retenu que cette pièce de lin, datée de... (là, je ne sais plus trop) a reçu - je crois que c'était entre 1460 et 1490 - là, vous voyez que j'ai bien écouté - un rajout qui, après avoir été  dûment , analysé, authentifié - microscope électronique et datation au carbone 14 à l'appui - a pu être certifié comme étant du pur coton,  de celui qui poussait précisément à ...(là, je ne sais plus). De ce rajout (qu'en occitan, on appelle  un "petas" ( restez au masculin, svp), les scientifiques ont eu la permission de prélever une minuscule partie du drap pour approfondir leurs recherches, grâce à la grand bonne volonté de notre sainte mère l'église (je ne mets pas de majuscules, ça va plus vite). Grâce à la généreuse compréhension du propriétaire,  la communauté scientifique a pu partager ce tout petit bout en 4 plus petits morceaux afin de poursuivre les analyses en 4 laboratoires différents, ce qui témoigne d'une parfaite garantie de sérieux et d'objectivité. Enfin, on allait savoir ! Silence dans les rangs !
Hélas, tous ces travaux ont permis de faire apparaître des choses qu'on n'avait jamais vues et qui seraient, à côté de gouttes de sang dûment certifiées, des gouttes de sérum. Etonnant, non ? Et puis de nous dire que l'image qui apparaît sur le tissu est un positif et non un négatif, comme on aurait pu s'y attendre. Vlan ! nous voilà avec un mystère de plus sur les bras !
Autrement dit - et ce sera la conclusion du documentaire (diffusé sur une chaîne publique), plus on pose de questions, plus il en apparaît de nouvelles !!!
Comme si ce n'était pas  le propre des mystères, de se nourrir d'eux-mêmes ? 
J'oubliais de vous donner les résultats de l'analyse des quatre ou cinq fibres de coton extraites du "petas", qui sont que, finalement, elles ne datent peut-être pas du XVème siècle Alors ? 
La suite au prochain numéro,car il y en aura sûrement bientôt un autre.
Peut-être que, vers la fin, mon attention s'est un peu relâchée, mais ce que j'ai retenu de plus assuré, pour ma part, c'est que le processus de datation au Carbone 14 consiste à compter les atomes un par un, à la façon dont on compte les poissons qui franchissent une échelle à saumons. Et ça, je suis bien content de l'avoir appris !